La galerie anne barrault est heureuse de présenter une nouvelle exposition de Pierre Moignard, à l’occasion de la publication de sa monographie aux éditions Dilecta.
Pierre Moignard serait-il de ces utopistes, sublimes et dérisoires, encore capables d’entraver la marche des colonnes de chars ?
Contre le flux à haut débit des images actuelles, il dresse les digues précaires de son imagerie grinçante.Aux apologues de la « glisse », aux chantres de la vague et du courant, il préfère l’humble héroïsme du castor, celui des bâtisseurs de châteaux de sable (…) au surgissement hirsute, en tout point opposées à «l’oeuvre d’art-ruban à tout le mètre inépuisable ».
La phrase par laquelle s’ouvre son film Holyland Experience: « L’ancien n’est plus, le nouveau n’est pas encore », déverrouille le sens de chacune de ses oeuvres. La lame qui sépare l’hier du demain sculpte ses tableaux. (1)
Animé d’une exigence farouche, année après année, Moignard a élargi, affiné son panthéon artistique. Guston, Titien, de Kooning, Goya, récemment Picasso, lui ont inspiré une série de tableaux composites. Constatant que ces « phares » avaient nourri leur plus beau feu de leurs observations sociales, de leurs engagements politiques, Moignard, de la tour d’ivoire de l’art a bientôt occupé les créneaux…
La notion d’« images dialectiques » (dans sa complexité) rend assez bien compte de la nature des oeuvres de Pierre Moignard. Fruits de l’application méthodique d’un principe de contradiction, elles lui doivent leur puissance de révélation. (2)
Il a développé de nombreuses séries de compositions en plan large ou en plan rapproché, de plus en plus ouvertement liées au référent cinéma. Plusieurs séjours à Los Angeles et la découverte de Las Vegas on introduit une porosité entre sa peinture et le décor de cinéma, allant jusqu’à l’amener à faire réaliser certaines toiles par des décorateurs. Avec ces oeuvres-limite, la peinture s’est comme oubliée dans le cinéma ; le peintre s’est fait cinéaste-peintre, pour enregistrer l’oubli de la peinture (…) Pierre Moignard s’approprie le référent cinéma pour requalifier la peinture. Par le détour du cinéma, le peintre nous propose des images de l’oubli, pour nous permettre de toucher au réel. (3)
Une certaine géométrie dans l’action lui suffit. Il l’a scrupuleusement construite dans ses tableaux, période après période avec cette nécessité d’aller le plus loin possible et bien au-delà de ce que l’on peut en dire. Depuis toutes ces années, lui n’a cessé d’avancer en tant que peintre… mais rien de ce qui, à ces tout débuts, était déjà là – c’est-à-dire tout –n’a disparu. La peinture n’existait et n’existe que dans le présent dela peinture. (4)
On l’aura compris, si les tableaux de Moignard sont de factures et d’écritures très différentes, il n’est jamais question de style. Le peintre est convaincu qu’il a quelque chose de plus intense que la seule volonté d’un auteur, que ce quelque chose se situe à l’extérieur. Prendre la chose déjà faite ou la chose déjà là, ce n’est donc pas citer, c’est leur inventer d’autres vies qui n’ont d’intérêt que si elles ouvrent une espèce de perspective sur la réalité extérieure à la peinture. Ainsi Moignard aime-t-il nous convaincre avec Manet que «l’art c’est l’écriture de la vie ». Et l’on croit avec lui, qu’en art, l’imagination réinvente les conditions toujours renouvelées de cette ouverture. Le défi pour la peinture est de ne pas l’enfermer dans sa qualité de médium à pratiquer pour la porter au style. Ou pire, de la restreindre aux usages qui l’envisagent comme si elle n’étaitrien d’autre qu’un véhicule de la « tempête des images » parmi d’autres. (5)
(1) Didier Ottinger, « Dans le flux des images », Pierre Moignard, éditions Dilecta 2021.
(2) Didier Ottinger, « Moignard Au rond-point de l’histoire », Ibid.
(3) Catherine Grenier, « Pierre Moignard, l’oubli de la peinture », Ibid.
(4) Fabrice Hergott, « Une géométrie dans l’action », Ibid.
(5) Véronique Giroud, « Extasy as such », Ibid.
L’ensemble de ces textes est extrait de la monographie de Pierre Moignard, qui est publiée aux éditions Dilecta.
Broché, cousu
128 pages
25 x 29,5 cm à la française
75 images
Textes de : Véronique Giroud, Catherine Grenier, Fabrice Hergott, Rodolphe Olcèse, Didier Ottinger
Langues : bilingue français / anglais
Éditions Dilecta
ISBN : 978-2-37372-111-9
Prix : 32 euros
© Éditions Dilecta, 2020
© Pierre Moignard, 2020
avec le soutien de l’aide à la publication du Centre National des Arts Plastiques : CNAP, Les Ailes de Caïus, et la galerie anne barrault
vue de l’exposition Tableaux Nouveaux, acte II de Pierre Moignard
galerie anne barrault, (photo d’Aurélien Mole)
vue de l’exposition Tableaux Nouveaux, acte II de Pierre Moignard
galerie anne barrault, (photo d’Aurélien Mole)
vue de l’exposition Tableaux Nouveaux, acte II de Pierre Moignard
galerie anne barrault, (photo d’Aurélien Mole)
vue de l’exposition Tableaux Nouveaux, acte II de Pierre Moignard
galerie anne barrault, (photo d’Aurélien Mole)