Dominique Figarella, artiste français né en 1966, propose sa deuxième exposition personnelle à la galerie anne barrault. Engagé dans une exigeante pratique de la peinture tout en participant à des projets transverses, il a récemment collaboré avec Mathilde Monnier, chorégraphe, lors de la création de Soapéra, présenté au printemps dernier au Centre Pompidou à Paris. De la danse à la peinture, cette œuvre en mouvement illustre l’intérêt de l’artiste pour le processus créatif et la temporalité de composition de la forme peinte. C’est ce que l’on retrouve dans ses tableaux récents où il intègre des photographies de l’oeuvre en cours, interrogeant le rapport de chacun de ces médiums à la réalité.
« Avoir une vision du monde, pratiquer cette vision, c’est vouloir un rapport construit dans cette production d’images que nous projetons sur lui »
Dominique Figarella
Chez Dominique Figarella, le tableau est une partie d’un dispositif dont le spectateur constitue une autre part essentielle. Dans le « cube blanc », espace de la galerie, le tableau est la matrice de cette expérience menée à plusieurs. Si l’objet tableau traduit à la fois l’émotion de l’artiste et la liberté de l’artisan, ce qui fait sens est bien l’interaction entre cet objet, dans un lieu, à travers un regard. L’œuvre de Dominique Figarella est comme un texte théâtral, par essence lacunaire : les choix de mises en scène et l’accueil du public lui donnent toute sa dimension vivante.
Le tableau est aussi envisagé à la fois comme le réceptacle et le témoignage d’expérimentations et d’exploration des matériaux, techniques et médiums. Si l’orthogonalité du support est conservée, c’est pour mieux en dynamiter les limites. On a déjà rencontré dans l’œuvre de l’artiste des chewing-gums, des balles de tennis, du sparadrap, des monochromes sur aluminium, des textiles, du plexiglas…
« J’utilise n’importe quel matériau en fonction des exigences du tableau » : ces mots de Kurt Schwitters illustrent parfaitement la démarche de Dominique Figarella. Tous les surgissements peuvent être intégrés au processus de création pour susciter l’émotion.
Sur un tirage photographique intégré à l’œuvre, on apercevra parfois les jambes d’une silhouette humaine portant le tableau dans un jeu subtil de mise en abyme. Parodie d’autoportrait ? Clin d’œil de l’artiste/artisan ? « Making-of » de la réalisation ? Peut-être tout cela à la fois.
Les œuvres, volontairement non titrées, sont offertes en partage à tous ceux qui les rencontrent. Chacun peut jouir sans entrave de cette précieuse liberté d’« avoir et de pratiquer sa propre vision du monde » pour reprendre les termes de l’artiste.
Dominique Figarella aime l’idée que l’abstraction de ses tableaux ne parle de rien. Cette exposition, comme le reste de son travail, est une ouverture sur cette négativité qui nous interpelle tous. En cela, son œuvre est universelle.
Marion Legall